e-XIV Le coin des amis

 

Le président jjw raconte (13) :

Attention : SCOOP !

« Ministre, moi ? Non, merci ! »

par fsz site polonais-et-potasse.com

   1) On croit, comme ça, après les avoir fréquentés plus de cinquante ans, qu’on a fait le tour des gens, qu’ils n’ont plus de secret(s) pour nous… Eh bien, cela peut être très faux !

   2) A preuve, jjw n’a jamais pipé mot du fait qu’il a été pressenti, et sérieusement, pour entrer dans le gouvernement de cohabitation formé par Edouard Balladur fin mars 1993, comme Secrétaire d’Etat aux PME (ou Petites et Moyennes Entreprises), ministre alsacien quoi, et qu’il a refusé le poste, ô chose exorbitante !

   3) Tout à coup, il y a quelques jours, le fruit mûr (et devenu trop lourd ? avec le temps ?) est tombé de l’arbre : le président m’a donné le beau texte ci-dessous où il raconte cet épisode, comment dit-on déjà aujourd’hui ? « improbable »… Mais vrai ! De fsz, le 03-03-24.

   4)  Texte de jjw du vend 08-03-24.

   «  Le 29 mars 1993, Edouard Balladur devient Premier ministre du premier gouvernement de cohabitation du second septennat du président Mitterrand.

   Dans son gouvernement, Simone Veil à la Santé, François Bayrou à l’Education nationale, Pierre Méhaignerie est Garde des Sceaux, Michel Barnier est ministre de l’Environnement, Alain Madelin est ministre des entreprises et de l’artisanat. Edmond Alphandéry est ministre de l’Economie, ce qui me fait un grand plaisir. Mes collègues Bernard Bosson et Philippe Douste-Blazy deviennent ministres délégués.

   Balladur ne voulait pas de secrétaires d’Etat.

   La démission, le 11 mai 1995, d’Alain Madelin, aux idées trop progressistes à ce moment, rebattit un peu les cartes, mais ne modifia pas les équilibres du gouvernement. Madelin fut remplacé par Jean Arthuis nommé Ministre des entreprises et du développement économique.

   Le ministre de l’Economie et des finances, Edmond Alphandéry, fut prié de trouver une personne qui serait chargée des Petites et moyennes entreprises et de l’artisanat.

   Alphandéry, j’avais un peu appris à le connaître au sein de notre groupe parlementaire centriste puis UDF, et je m’étais une fois ou deux rangé à ses côtés dans des débats internes un peu houleux… C’était un type toujours un peu rouspéteur et se sentant assez incompris dans notre groupe.  Il s’asseyait souvent à côté de Raymond Barre (qui avait été son professeur à l’Institut des études politiques de Paris) pour bavarder pendant les séances ou pour écouter les conseils de l’ancien Premier ministre. Et Raymond Barre était assis à un mètre de moi, dans l’hémicycle.

   Alphandéry, reçu à l’agrégation d’économie de l’Université de Chicago, docteur d’Etat en sciences économiques, député UDF du Maine et Loire était entré à l’Assemblée nationale le même jour que moi.

   Issu d’une famille juive installée dans le sud-est après la guerre, Alphandéry avait eu un grand-père, Claude, ancien député, embarqué avec sa famille sur le fameux paquebot « Massilia » avec les parlementaires voulant fuir la débâcle, déchu de sa nationalité française comme juif, par le gouvernement de Vichy. Claude Alphandéry était entré dans la Résistance aux heures les plus chaudes de l’occupation et y avait joué un rôle très important sous le pseudonyme de « Cinq-Mars ». Grand officier de la Légion d’honneur et médaillé de la Résistance, il quitta plus tard le Parti communiste pour devenir Mendésiste, puis pour soutenir Mitterrand !

   Le 12 ou 13 mars 1995, après l’annonce du gouvernement, mon assistante, Valérie Fiorito (aujourd’hui Madame Chaumanet) m’annonce toute émue qu’elle vient d’avoir Alphandéry au tél : « Il veut vous parler, voici son numéro », ajoutant, « Il vient d’être confirmé, vous devriez penser à l’en féliciter ! »

   Le ministre me demandait d’aller le voir à Bercy.

   J’avais connu, jeune député ou bien même avant, assistant parlementaire du sénateur Schielé, les locaux prestigieux du ministère encore installé dans une aile du palais du Louvre, aujourd’hui rendue aux visiteurs du plus beau musée du monde !

   Les locaux « fonctionnels » que je découvrais au 139 rue de Bercy n’avaient rien de très impressionnant ni de très beau et encore moins de grandiose, du moins à mon goût !

   Après un dédale de couloirs et de bureaux, le ministre m’accueillit souriant et amical.

   Après mon mot de félicitations et d’amitié, il alla droit au but.

   « Voilà Jean-Jacques, tu es un député très apprécié et actif. Moi, j’ai récupéré une partie des missions que Madelin n’avait pas pu assurer, il était vraiment trop chargé. Le Premier ministre l’a bien compris. Et là j’ai besoin de toi. Il me faut un secrétaire d’Etat qui connaisse bien le monde de la campagne, je t’ai réservé les Petites et moyennes entreprises et l’artisanat, le vrai vivier de notre pays. Tu connais ce monde, tu y feras merveille. Je propose ton nom demain au Premier ministre. »

   Il me faisait un cadeau aussi merveilleux qu’inattendu. Espéré, attendu, prié par des centaines de postulants pas toujours anonymes.

   Mais pas par moi.

   Pierre Schielé avait un jour, devant moi, refusé cet honneur que lui proposait Raymond Barre.

   Je ne voulais ni perdre « ma mairie », ni « mon » conseil général, je voulais rester député.

   Tout se bouscule dans mon esprit : entre la claire raison qui me pousse à accepter cette proposition incroyable, et le ciment de ma résolution bien ancrée dans mon esprit, résolution qui ne date pas d’hier, et qui me commande de dire non !

   Autant je rêvais, depuis l’âge de raison, de devenir député, délégué du peuple pour dire la loi, et autant je m’étais battu pour représenter mes concitoyens à ce niveau, eh bien, autant je ne m’étais jamais vu ministre, jamais !

   Je le dis à Edmond  Alphandéry qui me regarda, incrédule, carrément stupéfait : « Tu es fou, Jean-Jacques, ça ne se refuse pas ! Je pense que tu déconnes et ce n’est pas le moment ! »

   Il sortait d’une grande famille d’intellectuels et de financiers, son regard, derrière ses lunettes cerclées d’or, trahissait une forme de consternation contenue, presque de l’indignation, mais avec des formes propres au « grand monde » auquel je n’appartiendrai jamais !

   « A la vérité, mon cher Jacques, je ne m’attendais pas à cela, et je crois que tu n’as pas mesuré les enjeux pour toi et ton département. Réfléchis, tu en as encore le temps. Rentre chez toi ce soir ; parles en à ta femme, je suis sûr que tu changeras d’avis. J’ai besoin de ta réponse demain, reviens, je t’enverrai prendre par la navette fluviale ! »

   En quittant son bureau, je le vis perplexe, secouant la tête…

   Quand tu es de Sausheim et député à Paris, ce n’est pas comme si tu habites Saint-Cloud ou à 50 kilomètres de la rue de l’Université. Mais je savais que ma femme, Suzanne, allait plutôt mal vivre un épisode ministériel de son mari. Elle était une épouse et une maman adorable, mais pas une femme du monde. Fière de voir son mari député puis président du Conseil général, elle redoutait par dessus tout toutes les parties officielles et s’y résignait difficilement !

   Quant à moi, tout ce que j’avais conquis, c’était de haute lutte. Dans des campagnes perdues, dans des campagnes gagnées, toujours avec le concours d’amis fidèles et passionnés, très rarement avec le secours de mon parti, auquel, vraiment, je n’étais redevable de rien !

   J’étais, passionnément, maire de mon village depuis 1983, après deux mandats de conseiller municipal, j’y avais fait des réalisations de valeur et pris des initiatives nombreuses, parfois hardies ! J’avais été conseiller général dès 1979, j’y avais fait mes classes et mes preuves. Et en 1988, l’année même de mon élection de député, j’avais après le retrait du président Goetschy pris la présidence de l’assemblée départementale, devenue un Conseil général respecté… Ma 3ème raison de vivre, pour être clair.

   Et j’avais encore des projets, des idées, des ambitions.

   Pas question de céder tout cela pour un autre avenir.

   Je dis cela à un Edmond Alphandéry qui était lui-même président de son Conseil général. Et il n’insista plus. « Tu es donc décidé, c’est définitif, ponctua-t-il. Ajoutant : « Mais j’ai un avis à te demander. »

     « Pour moi, tu étais partant. Je n’avais pas réfléchi à quelqu’un d’autre. Mais j’ai des propositions. Tu connais certainement Jean-Pierre Raffarin… Qu’en penses-tu ? Il est de notre groupe politique…

« Tu es quand même un sacré phénomène, Jean-Jacques, pour ce que tu viens de faire. Je le raconterai à Raffarin… »

   Le même après-midi, mon tél sonna, c’était la voix un peu éraillée devenue depuis familière à tous, de Jean-Pierre Raffarin. Qu’en fait je connaissais très peu.

   « Alphandéry vient de me parler de votre entrevue. Il vient de me proposer ton poste, que tu aurais refusé. C’est difficile à croire, tu n’as pas changé d’avis ?! »

   Je le rassurai.

   « Eh bien Jean-Jacques, si je suis nommé aux Petites et moyennes entreprises comme le propose Edmond, je ferai mon premier déplacement officiel dans ta circonscription, et je raconterai à tous chez toi le pourquoi et le comment. »

   Le … ?, Jean-Pierre Raffarin vint effectivement passer la journée dans la circonscription, et je lui fis visiter, entre autres, avec le jeune maire de la ville, mon confrère Francis Hillmeyer, le confiturier Beyer, de Pfastatt, le père Beyer faisant déguster au ministre sa fameuse confiture d’églantines sauvages, puis pour faire passer, un vieux schnaps distillé par son propre grand-père dans les années 1920…

   Jean-Pierre Raffarin a eu la carrière prodigieuse dont chacun se souvient.

   Edmond Alphandéry a été un grand ministre des finances et il a notamment restauré la crédibilité de la France, lancé un grand emprunt et privatisé la BNP de même qu’Elf-Aquitaine…

   Moi-même, j’ai regagné ma mairie et mon bureau colmarien sans trop parler de cet épisode.

   Comme je devine que mon récit va susciter beaucoup de commentaires incrédules, je vais envoyer ce texte aussi bien à Edmond Alphandéry qu’à Jean-Pierre Raffarin, les invitant amicalement à me faire l’honneur de confirmer cette histoire, celle d’un fou qui ne voulait pas devenir ministre ! »

   5)  Notre additif du 30-06-25. Diverses circonstances, entortillées, bien fastidieuses ! dans les lents méandres des secrétariats importantissimes, et, pourquoi le cacher ? de leurs intermittences, ont tant fait qu’il nous a fallu attendre plus de 15 mois ! la confirmation manuscrite par Jean-Pierre Raffarin, « impossible » à contacter, des propos de jjw, et donc nous avons suspendu la publication de ces derniers sur ce site d’autant (en finissant par trépigner de frustration et d’impatience, avouons-le). On lira le mot de l’ancien premier ministre, giscardien à ses débuts en politique, du président Chirac (de 2002 à 2005) ci-dessous, en a).

   6) Illustrations.

   Ci-dessous :

  1. b) 6 photos (dont une en nb) de la visite de Raffarin à la confiturerie Beyer. Outre les tenanciers de l’Entreprise, on trouvera sur les clichés les principaux personnages suivants : le ministre Raffarin, le président jjw, le préfet Cyrille Schott (qui a officié comme tel dans le Haut-Rhin de 94 à 98 ; dans ses mémoires « Un Alsacien préfet en Alsace », il ne manque pas une occasion d’éreinter jjw, nous en reparlerons ; éreinter jjw, un homme pareil : enfin peut-on seulement ? en dialecte-sud-68 : « enfè, kot ma nouma » ?) et le maire de Pfastatt (depuis 95) Francis Hillmeyer (successeur de jjw à la députation en juin 2000) ; un des clichés est recadré pour servir sur notre sommaire.
  2. c) tel qu’on le trouve dans tous les bons commerces d’alimentation générale, le fameux pot de confiture d’églantines considéré par le président comme le produit-mascotte-emblème-fétiche de la Maison familiale Beyer (depuis 1921) et vanté par lui comme exemple fameux de la qualité « AAA : alimentaire-artisanale-alsacienne » (label inventé par mes soins il y a 10 secondes, pour les besoins de la cause), dont toute la région mulhousienne, à la vaste ronde, peut se montrer fière ! Bon, il faut dire : pour le goût, au président on la lui fait pas, il sait ce qui est bon… Et je sais ce que je dis, quand je dis cela, il est question ici de sa confiture préférée, mais, pour pousser le propos sur une nouvelle case du damier des mémoires de jjw, il faudrait aussi avoir goûté à son « miel de montagne» (d’acacia, en ce moment),  de son « Rucher des Ecureuils » (voir le pot en photo), qui vaut le détour pareillement, délicieusement ; oui, le président consomme, mais il produit, aussi ; il aime le confiturier, mais apiculteur il est, par surcroît, avec ses reines, ses peuples, et tout le toutim butinant-laborieux, voilà où se manifeste de nouveau, surtout par les temps pollués et réchauffés qui courent, qu’il a une sagesse d’avance, la fameuse sagesse-jjw…

   6) De fsz, terminé le 30-06-25, la veille de mes 70 ans, l’année de ses 85, au président ; matériel protégé par le droit d’auteur (loi française du 11 mars 1957).

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