e-mémpol ; thème II-

Les Polonais et le Travail

La tuerie-Hirak : 6 morts !

par fsz site polonais-et-potasse.com

   1) Les pages vraiment très noires dans l’histoire des Polonais des potasses d’Alsace sont fort heureusement rarissimes. Dans ce contexte, « l’affaire Hirak » (on trouve aussi l’orthographe finale « ck » au lieu du seul « k ») constitue d’évidence le fait divers tragique qui continue de nous sidérer le plus, de nous déchirer le plus, que nous ayons ou non du sang polonais dans les veines.

 

Un massacre pas possible !

 Voici en quoi consistent les faits :

   2) le mineur du puits « Théodore » de Wittenheim André Hirak, « de réputation correcte » (sic), habitant au n°7 rue Bruat, dans la cité Ste-Barbe, un logement d’ouvrier d’une « maison à quatre » (logements, du n° 7 au 13), a exterminé à la hache, dans la nuit du 2 au 3 février 1939, ses quatre enfants et son épouse, à son domicile.

   3) Le drame est découvert le matin du 3, par la famille et les voisins, mais le meurtrier, lui, a fui, et on le retrouve, seulement le 9, pendu, dans les bois de la commune.

   4) Les victimes sont inhumées dans l’après-midi du 6, lors d’obsèques suivies, sous le choc de l’incroyable, par une nombreuse assemblée.

 

Une injustice brutale !

   5) Pourquoi ce crime ? Hirak, avec d’autres, était sous le coup d’un arrêté d’expulsion, et il ne voulait pas, à aucun prix, rentrer au pays, synonyme de retour à la misère, et de répression politique. Son départ était imminent, programmé précisément pour le 3. André avait pourtant effectué des préparatifs de départ ; mais en même temps, il aurait annoncé son geste désespéré, et irrémédiable.

   6) La direction des Mines lui reprochait d’avoir pris part à la grève du 30-11-38. Or Hirak s’est défendu en affirmant être considéré à tort comme gréviste, ayant en fait été empêché par des grévistes de rejoindre son poste de travail (Etait-ce vrai, tout à fait vrai ? Rien ne permet ni de confirmer ni d’infirmer, avec certitude absolue.) Cependant, l’Entreprise persista à voir en lui un fauteur de troubles, un agitateur hostile, à neutraliser. Suivant les préjugés moyens de l’époque, cette perception patronale semblait d’autant plus vraisemblable que l’on savait l’ouvrier engagé dans le syndicat CGT, et militant du Parti communiste…

   7) Quoi qu’il en soit, les Polonais, du moins ceux qui étaient informés du fait divers, ont très généralement, surtout les femmes, voulu se souvenir d’André  comme de la victime d’une monstrueuse injustice, aveuglément sanctionné seulement pour l’exemple ; allez, poussons le bouchon : comme d’un martyr : de la condition ouvrière ; et hop, encore une petite couche : martyr de la xénophobie.

  

Une « mythification » floue !

   8) De proche en proche et au fil du temps, deux inexactitudes se sont imposées dans de nombreux esprits comme des éléments sûrs et indiscutables de l’histoire de cette insoutenable boucherie :

  1. a) les événements auraient eu lieu non en 1938-39, mais en 1936, comme une péripétie, ou une conséquence, du mouvement du « Front populaire » ;
  2. b) caché dans les bois, l’assassin aurait « assisté », de loin, des yeux, aux obsèques de sa famille (or, il n’y avait pas de forêt à proximité du lieu d’inhumation), avant de se suicider par pendaison ; or il a été établi, par autopsie, que le décès, effectivement par pendaison, est survenu « bien avant » (sic) l’enterrement, éventuellement déjà le 4.

.

Droit du sang ou du sol ?

   9) Il convient d’attirer l’attention sur le fait que le « cas » Hirak comporte une difficulté juridique de taille. Les deux filles les plus jeunes du mineur sanctionné, nées sur le sol français, mineures au moment des faits, étaient en tant que telles, suivant le droit du sol, inexpulsables. Dès lors, que faire ? Expulser une partie de la famille ? Toute la famille ? Personne de la famille ? On n’a pas fait dans la nuance : hop, tout le monde dehors ! de la même manière que, suivant le droit du sang, le chef de famille, étranger attentateur (présumé, et seulement présumé !) à l’ordre public.

 

 

 

Notes

   10) complément d’information : André Hirak est né le 12-12-1895 ; sa femme était notablement plus jeune, puisque née seulement en 1903 ; il travaillait depuis 1928 au puits Théodore ; au moment de la tragédie, ses enfants, dans l’ordre d’aînesse Emilie, Michel, Anne, Marie, nés de 1924 à 30, avaient donc entre quinze et neuf ans.

   11) commentaire : par quelque bout qu’on le prenne, Hirak est vraiment le minoritaire, voire le marginal, par excellence : ukrainien parmi les Polonais, uniate parmi les catholiques romains, politiquement « rouge » parmi les « noirs ».

   12) Pour illustrer notre propos : la photo d’une « maison à 4 » (logements), prise en 1935 dans la cité Fernand-Anna, à Wittenheim (doc jch = Jean Chechinski, chroniqueur de Kingersheim, ancien conseiller municipal).

   13) En additif à notre article, nous proposons à la lecture celui, complémentaire, que Maurice Haffner, ancien adjoint au maire de Wittenheim, a consacré au même sujet dans le très important mémoire-papier de l’ASCT (Association de sauvegarde du chevalement de Théodore) sur le centenaire de la cité minière Ste-Barbe.

 

   14) Terminé de rédiger le 17-05-23, jour du 35ème anniversaire de la mort de mon grand-père maternel mineur polonais Félix, et fête patronale de mon cousin-filleul Pascal ; notre étude est augmentée par le 13) ci-dessus, le 01-11-23.

   15) Matériel protégé par le droit d’auteur (loi française du 11 mars 1957).

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Cet article a 2 commentaires

  1. Tina Pytel

    I am sure this paragraph has touched all the internet viewers, its really
    really fastidious article on building up new weblog.

  2. francis.szulc@outlook.fr

    Je traduis le commentaire en anglais de Tina Pytel: « Je suis sûre que ce paragraphe a touché tous les internautes, c’est vraiment vraiment un article méticuleux sur la création d’un nouveau blog. » Merci à l’auteur (auteure, autrice, etc) pour cette appréciation positive. fsz

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