e II – Les Polonais et le Travail

100 ans de l’Asca-foot : au fait, quel

palmarès ? La grande époque !

   1) Si on ne l’a pas entendu cent fois, alors on ne l’a pas entendu une seule : « Ah, l’Asca, à l’époque, c’était quelque chose !… » Et moyennant cette haute expression de la nostalgie ordinaire, de ce « C’était mieux avant… » tellement répandu aujourd’hui en tant de matières, la consistance du si glorieux palmarès du club n’était jamais précisée, restait toujours dans un enivrant brouillard qui laissait imaginer n’importe quoi.

   2) Alors que nous nous approchons du centenaire du club, l’an prochain, précisions quand même, autant que faire se peut, les choses. D’un rapide coup d’œil, on s’aperçoit que le club-fanion des mineurs, du stade du château d’eau, n’a pas seulement brillé comme fournisseur de talents dignes d’accéder aux échelons du professionnalisme (rappelons notre article à ce sujet sur ce blog : les 13 pros de l’asca), mais a accompli des performances, collectivement, remporté des titres, qui font mériter au club notre estime et notre affection, malgré son incontestable déclin, sur les causes duquel on devrait peut-être un peu plus s’interroger, car il ne suffit peut-être pas d’asséner qu’autrefois on courait pour la beauté du geste et qu’aujourd’hui on ne veut même plus trop courir pour le fric, et autres lieu communs du même genre…

   3) Pendant toute la période récente, j’ai été content d’en trouver au moins un pour s’efforcer d’établir clairement les titres de gloire du club, c’est René Giovanetti, dans son livre… le moins indispensable, peut-être, celui sur « Wittelsheim et ses mines de potasse », paru en 2014, d’un beau format A4, mon préféré, pour le traitement illustré de ce genre de sujet  ; aux pages 133-142, l’auteur entreprend de survoler les hauts faits d’ « Une institution à Wittelsheim : l’Asca », en commençant bien sûr par ceux de sa section la plus ancienne, celle de football. Il tient des propos d’une netteté bienvenue à la page 135, je cite :

   « L’Asca a remporté 5 titres de Champion d’Alsace en 1950, 1954, 1959, 1967, et 1971. Elle a disputé 8 finales de Coupe d’Alsace et en a remporté 4: en 1950, 1951, 1953, et 1957. L’équipe I a évolué 13 saisons en CFA, le Championnat de France Amateur, équivalent du National d’aujourd’hui. » Merci, depuis le temps que je cherchais à me référer à un comptage de ce genre, qui en trois phrases en dit plus long qu’en bien des pages.

   4) Et en grattant un peu, je me suis aperçu que déjà bien avant lui, Louis Granacher (mon « maître » de cours moyen, à l’école de garçons d’ Amélie1, en 64-66, bec incisif de moraliste et œil pénétrant de sociologue, et grand serviteur presque totalement bénévole de l’image publique de l’Asca, hommage appuyé soit ici rendu à cet homme  discret qu’on pouvait quand même à coup sûr repérer au stade à sa sempiternelle gitane papier-maïs bien sûr toujours éteinte collée à la lèvre !), Louis Granacher, dis-je, avait déjà fait l’essentiel du boulot, en 1967, alors que l’ASCA accédait au CFA « pour la onzième fois », dans le respecté hebdomadaire « France Football », où il se montrait journaliste sportif de toute première force, autant informateur minutieux qu’évaluateur d’une lucidité jamais prise en défaut. Franchement, mon ancien instit, il avait comme on dit l’art et la manière, je l’admire, en « collègue » plumitif, ayant eu moi aussi, pour être la hauteur des circonstances, de l’attente des lecteurs, à savoir relever le défi d’un « papier » marquant, chiadé.

   5) La récapitulation des performances de l’ASCA établie par Granacher met clairement en évidence qu’il s’agit, à partir de 1951-52, d’une permanente oscillation entre CFA et DH (Division d’honneur). Je crois qu’on touche bien du doigt comme l’ASCA a pu être une phalange valeureuse quand on remarque qu’elle a été capable de se maintenir en CFA 6 saisons de suite, de 59 à 65, et d’atteindre des classements plus qu’honorables, 4ème en 62, 5ème en 64.

   6) Moi, j’ai un sacré bol ! Je croyais devoir pas mal potasser pour établir ce fameux palmarès : eh bien non, il me suffit de faire la synthèse de l’inventaire systématique des faits et gestes de l’équipe première mis à ma disposition par mon copain d’enfance de la cité Grassegert, Marco Zemb, lui aussi ancien élève de Granacher, deux ans avant moi, mon documenté et avisé binôme en recherches « ascaïennes », sur le web et ailleurs, gros et chaud merci à toi, mon vieux !

   7) Au  titre des sources, on ne peut évidemment se dispenser de citer la plaquette du cinquantenaire (56 pages de format A4), œuvre désormais canonique, pour qui veut vraiment prendre la mesure du club, d’Hippolyte Hardy, le président général du club devenu « omnisports », membre du Directoire des Mines de Potasse, qui a laissé son nom au stade, et qui a dominé son sujet à un point qui force la haute considération : sa rétrospective reste une mine (c’est bien le moins, jeu de mots facile) d’informations sur ces premières décennies si débordantes de vitalité où les ambitions étaient au diapason des capacités.

   8) Oui, oui, que de propos liminaires, je sais-je sais : venons-en maintenant enfin au fait !

   9) 1947-48. L’essor de l’Asca-foot commence pour moi véritablement tout de suite après la fin de la guerre avec son équipe de cadets de 1947-48 ; c’est là la seconde génération de joueurs, depuis la création, des garçons nés autour de 1930, qui fait irruption victorieuse sur la scène, pardon, la pelouse, en remportant, je cite tout bonnement Hippo, p15, « Mais la palme va revenir aux cadets. Ils tiennent la tête de leur championnat et la garderont jusqu’à la fin. Ceux-ci vont remporter pour l’Asca, le 1er titre de champion de l’après-guerre. Ils seront champions du Haut-Rhin et champions d’Alsace. » Et je me permets d’ajouter : eh hop, c’est parti, pour une épopée, ballon au pied (ça rime).

   10) Le doublé de 1950 et 51. L’Asca gagne deux fois consécutives la Coupe d’Alsace, et donc conserve définitivement le magnifique trophée.

   11) La 1ère montée en CFA. En 1951, l’Asca accède pour la première fois au CFA (championnat de France, groupe Est), l’échelon le plus élevé du football amateur.

   12) « Tant qu’Opala sera là, l’Asca s’en sortira ». Et, en effet, quand Opala cesse de garder le but, avec la relégation en DH de la fin de la saison 64-65, on peut considérer que l’âge d’or de l’équipe première, commencé 15 ans plus tôt, est terminé. Le lion de la cage donne l’impression d’en avoir assez, de prendre des buts, et de ne plus suffire à sauver son équipe, par sa résistance héroïque et spectaculaire aux assauts furieux des adversaires.

   13) Certes, les blanc-et-bleu auront encore de belles périodes : 2 saisons consécutives en Division 3 (71-73), et 3 saisons consécutives en National 3 (94-97), sous donc les appellations « modernisées » de l’ancien CFA ; mais la solidité, la conviction et le panache du début des années 60 ne se revoient plus : le match (que j’ai vu de mes yeux vu, j’avais 10 ans, petit acteur des festivités, déjà) de démonstration du 40ème anniversaire, le 23 mai 65, contre les pros de 2ème Division de Metz, perdu la tête haute d’un tout petit but de principe (1 à 0), fait voir que les pêchus joueurs ont pris assez « de bouteille » pour songer à passer la main à des gardons plus frais qu’eux, comme c’est la loi du genre, dans le sport, et finalement en toutes choses.

   14) Le décrochage plus inquiétant suivant du club intervient en 2006-08, où l’équipe se trouve rétrogradée en dessous de la DH, en « Excellence (Haut-Rhin) », ce qui fait pousser les hauts cris à certains nostalgiques des temps prestigieux : « Mais aujourd’hui, l’Asca c’est plus rien ! » N’appuyons pas davantage là où ça fait mal : ce qu’on a appelé « le désengagement progressif » des Mines, désengagement financier s’entend, à partir des années 70, laissait prévoir que le club dit « des mineurs », forcément, n’allait pas vers un avenir idyllique… Il s’agit malheureusement d’une histoire banale : d’autres clubs, en effet, faute du soutien d’une grande Entreprise industrielle, ont vu leur étoile pâlir… Et les Villes, les communes, qui ne disposent pas des mêmes moyens, ne peuvent prendre intégralement le relais, et suivre les enchères de ce qu’est devenu le sport de haut niveau, et tout simplement de bon niveau, dans la France actuelle. On a bien vu Mulhouse réduire sa voilure ; alors Wittelsheim, vous pensez bien… On en vient vite bien sûr à déplorer le rôle excessif de l’argent, le rôle déraisonnable de l’argent, le rôle fou de l’argent, dans le sport.

   15) Ceci étant, mieux vaut toujours un petit club plutôt que pas de club du tout, surtout pour les jeunes ; il est toujours bon pour leur éducation qu’ils puissent bénéficier d’une pratique sportive structurée, organisée ; cette offre sociale ne doit pas disparaître.

   16) Nota : pour être plus complet en ce qui concerne les hauts faits de l’Asca-foot, il reste à se documenter sur ses participations en Coupe de France. On ne dispose pour ainsi dire d’aucune donnée : il faudrait creuser, avis aux amateurs. Ce n’est peut-être pas sans espoir de récolter ; Granacher nous dit par exemple que le club, en 54-55, est éliminé de la compétition en 32ème de finale, par les pros du Racing Strasbourg ; on est là, ne l’oublions pas, dans la compétition aléatoire par excellence, où on peut très vite tomber sur vraiment plus fort que soi, et…rentrer au vestiaire.

   17) Illustrations :

  1. a) 2 clichés de la victoire de 51 en Coupe d’Alsace.
  2. b) « Pour la onzième fois », article de Louis Granacher dans « France Football » en mai 67, texte déjà remarqué et mentionné par mon ami Jean-Michel Cuénot dans son article à lui publié (« L’Alsace du samedi 06-08-05 page 39) à l’occasion des 80 ans du club, et où il réussit en particulier la performance de faire parler Roger Zemb, le papa de Marco et d’Alain, d’ordinaire si discret, pas du tout le genre à bomber le torse, même s’il a de quoi.
  3. c) 1ère de couverture de la plaquette du cinquantenaire élaborée en 75 par Hippolyte Hardy.

   18) Fini de rédiger le 20-04-24  par fsz ; matériel protégé par le droit d’auteur (loi française du 11 mars 1957).

Cette publication a un commentaire

  1. Francis Szulc

    Après avoir lu cet article, Sonia, la fille unique d’Opala, ma voisine d’enfance dans la cité de Grassegert, me destine le mail suivant, que je répercute ici, avec son autorisation: « Je viens de lire l’article très élogieux du palmarès de l’Asca-foot. Malheureusement, le club n’est plus ce qu’il était, mais comme tu l’évoques, la jeunesse est là et il est important qu’elle puisse bénéficier d’une pratique sportive essentielle à son épanouissement. » Amical merci à toi, Sonia, pour ta réaction, qui enrichit ce blog. fsz, le 30-04-24.

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